Appareil photographique Thornton Pickard Mark III 'Hythe'

 

Cette ' mitrailleuse photographique' Thornton-Pickard Mark III ' Hythe' constitue une des pièces les plus intéressantes de ma collection. Elle était utilisée pour entrainer au tir les pilotes du Royal Flying Corps (RFC, précurseur de la Royal Air Force) durant la première guerre mondiale et ressemblait fidèlement à la mitrailleuse Lewis. Fabriquée à partir de 1915, elle a été appelée Hythe probablement parce que l’école de tir se trouvait dans cette ville du Kent.

Les instruments de visée ont été malheureusement égarés et il nous faudra donc un peu d’imagination pour comprendre le fonctionnement.

Lors de l’écolage, l’élève et l’instructeur pilotent chacun leur avion. L’élève vole derrière l’instructeur et essaie de placer dans son viseur l’avion de celui-ci, comme s’il cherchait à l’abattre. Au lieu de tirer à balles réelles avec une mitrailleuse Lewis, l’élève simule le tir en prenant une photo avec la mitrailleuse photographique.

Avant de prendre une photo, l’élève doit accomplir toute une série d’actions, tout en maintenant son avion stable dans sa trajectoire et sa visée :

1. Faire avancer la bobine de film en utilisant la poignée d’armement, exactement comme il aurait procédé pour armer une mitrailleuse Lewis.

 

2. Enlever et replacer dans son logement le chargeur circulaire situé sur la mitrailleuse photographique. En tir réel, un chargeur est très rapidement vidé à cause de la cadence de tir qui s’élève à 550 coups par minute. Les Lewis montées sur les avions sont équipées de chargeurs surdimensionnés contenant 97 cartouches, c’est-à-dire plus du double que les chargeurs standards de l’infanterie qui n’en contiennent que 47. Cela ne correspond néanmoins qu’à 10 secondes de feu, ce qui est peu pour un avion sans cesse secoué par les vents et piloté par un aviateur sous adrénaline. Changer de chargeur est une opération difficile qui demande un bon entrainement.

L’instructeur peut savoir si le chargeur a été changé parce que la face inférieure de celui-ci est munie d’un bouton qui pousse sur une tige qui perce un trou dans le film à chaque changement de chargeur. L’absence de trou dans le film signifie que le chargeur n’a pas été remplacé.

 

3. Pour prendre la photo, l’élève presse la détente. Une seule prise de vue correspond à une rafale de projectiles de .303 (7,9 mm); pour prendre le cliché suivant, l’élève doit recommencer tout le processus décrit ci-dessus. La photo de l’avion-cible est prise à travers une lentille de verre sur laquelle est dessiné un réticule similaire à une toile d’araignée. Une fois le film développé, l’instructeur peut ainsi évaluer la précision du tir.

 

A l’heure actuelle, on utiliserait un simulateur de vol pour obtenir le même résultat.

Il faut mentionner que les aviateurs du RFC volent sans parachute car on considère qu’il freine l’audace des pilotes ; seuls les équipages des ballons d’observation sont autorisés à en avoir. Les Allemands par contre en sont progressivement équipés, spécialement à la fin du conflit.

Voici quelques informations concernant la société Thornton-Pickard. Fondée en 1888 à Manchester, elle est installée au 8-10 St Mary Street dans le quartier de Deansgate. Elle consiste en l’association d’Edward Thornton et d’Edgar Pickard. Le premier est un inventeur appartenant la frange supérieure de la classe ouvrière – il invente une voiture automobile qui est un échec -; le second est un ingénieur issu d’une famille Quaker fortunée. En 1892, la firme construit une usine dans Atlantic Street à Altrincham, dans le Cheshire. Suite au décès de Pickard en 1897, une société de personnes à responsabilité limitée est constituée. En 1899, Thornton en est évincé et migre aux Etats-Unis où il dépose un brevet pour un film de cinéma à trois couleurs qui est fabriqué sous licence par Kodak.